INTERPRETATION DES SUB TESTS DU WISC
Lors de la discussion sur un forum d'aufeminin, nous avons commencé
à aborder le sujet de l'analyse subtest par subtest. Il m'apparaissait
intéressant, étant donné que certains de mes confrères
psychologues ne poussent apparemment pas suffisamment leurs comptes rendus
oraux/écrits sur le sujet de vous apporter des connaissances théoriques
complémentaires à ce sujet. En effet, se limiter à
un simple chiffre de QI (indice de développement de capacités
intellectuelles mesurées par les tests) est réducteur et
n'éclairent pas suffisamment le fonctionnement intellectuel mesuré.
Une remarque préalable : cette analyse subtest par subtest est
une première étape, car dans un deuxième temps il
importe (et c'est finalement le plus important) de mettre en lien les
différents résultats pour avoir une vue plus globale et
qualitative.
Alors commençons l'analyse :
L'Echelle verbale mesure les capacités de compréhension
et de verbalisation d'une personne.
Information : c'est à dire l'investissement et l'intégration
des données culturelles et sociales (c'est à dire la culture
générale), et qui manifeste autant l'influence du milieu
culturel que du milieu scolaire, l'attention à la vie sociale,
l'aisance verbale.
Similitudes : ce subtest est relativement indépendant
des influences socioculturelles et de l'adaptation scolaire. Très
"saturé en facteur G" (général, c'est à
dire finalement l'un des plus représentatif du potentiel intrinsèque
d'une personne), il met en jeu la capacité de conceptualisation,
de généralisation, de pensée catégorielle
(en bref, la logique abstraite).
Le surinvestissement de cette épreuve témoigne des efforts
tentés pour situer les objets dans une catégorie générale,
d'un effort pour situer à tout prix les choses qui l'environnent
pour compenser sa propre difficulté à se situer en tant
qu'individualité indépendamment de trop de comparaison avec
les autres enfants de son âge, la fratrie, etc. (c'est assez souvent
le cas chez les enfants surdoués de par mon expérience).
Arithmétique : met en jeu non seulement l'adaptation
scolaire, mais aussi la capacité de représentation mentale
de situations concrètes et d'opérations plus ou moins complexes.
Il est très sensible à l'émotivité notamment
en raison du chronométrage, mais aussi parce que les enfants le
relient parfois fortement à l'école et s'ils ont une expérience
négative de celle-ci, cela peut entraîner des angoisses.
Chez les hauts potentiels en échec scolaire, quand on essaye de
décortiquer la logique mathématique (puisque ce subtest
mesure non seulement le calcul mental, mais aussi le logico-mathématique,
il se présente sous la forme de problèmes à résoudre),
il est arrivé une petite dizaine de fois que l'enfant se mette
à pleurer car la charge émotionnelle était trop importante
(et comme ces enfants sont hypersensibles...). Cette épreuve peut
être chutée soit à cause de l'angoisse qu'elle fait
surgir, soit parce que la représentation mentale n'est pas utilisée
(à mettre en relation avec le résultat de Cubes et du subtest
facultatif Mémoire des chiffres quand l'enfant doit redonner la
liste des chiffres dans l'ordre inverse), soit que la représentation
symbolique des chiffres a une valeur particulière pour l'enfant
(par exemple, un enfant qui ne s'est pas senti compter pour les êtres
qui lui sont chers, en premier lieu les parents, peut avoir du mal à
apprendre à compter -et je parle de se sentir compter concrètement,
s'il y a carence ou que l'enfant n'a pas pu ressentir l'intérêt
et l'amour que ses parents lui témoignait du fait d'empreintes
précoces ou psycho-généalogiques-).
Vocabulaire : c'est à dire le champ lexical, la capacité
à exprimer avec des mots précis sa pensée, à
acquérir des connaissances et leur étendue générale,
la facilité de verbalisation donc (très dépendant
également du contexte scolaire et socioculturel).
Compréhension : qui met en jeu le bon sens (relativement
indépendant des acquisitions scolaires). Cette épreuve montre
surtout les capacités d'adaptation pratique, d'intégration
de l'éducation parentale et des normes sociales, des valeurs du
groupe.
Information et Vocabulaire ont rapport avec l'expression verbale, le QI
verbal montre le niveau d'expression oral, Vocabulaire a rapport au langage
relationnel, Information a plus rapport a la communication au niveau du
groupe.L'échelle Performance mesure les capacités d'organisation
perceptive et visio-motrice.
Complètement d'images : qui met en jeu les capacités
de perception fine, l'attention au détail, à ce qui manque,
l'impact de la réalité environnante.
Très réussie, cette épreuve peut signifier une grande
vigilance, un attachement à la réalité, au détail,
une maîtrise importante sur l'environnement. La question du manque
est ici également posée (puisque c'est la phrase de la consigne).
Code : utilise les capacités mnésiques (la
mémoire plutôt visuelle), mais aussi la concentration, l'attention
et surtout l'apprentissage (notamment le désir de réussir).
Elle est très sensible à l'émotivité en raison
du chronométrage (il s'agit de reproduire le maximum de code en
2 minutes) et c'est la seule épreuve qui fasse appel à l'aptitude
graphomotrice (en dehors dusubtest facultatif Labyrinthes).
Arrangement d'images : fait appel à l'aptitude à
saisir une situation dans son ensemble, à la capacité d'ordonner
logiquement et temporellement une situation concrète, à
l'adaptation pratique et sociale, elle implique a minima le sens dela
latéralité (finalement cela met en jeu le sens de l'observation,
de l'analyse,la logique concrète et les repères dans le
temps).
Cubes : qui met en jeu les capacités conceptuelles
d'analyse et de synthèse, de représentation mentale et d'abstraction.
C'est la logique abstraite comme le subtest Similitudes, mais avec la
notion de représentation mentale en plus la structuration spatiale,
la latéralisation, les capacités d'orientation.
Assemblage d'objets : qui fait appel à la structuration
spatiale, la latéralisation, mais implique aussi le schéma
corporel et l'image du corps. Notions de psycho à acquérir
: le "schéma corporel" est la représentation schématique
du corps réel, fondée sur des données sensorielles
multiples, proprioceptives et extéroceptives. L'"image du
corps" est la représentation du corps imaginaire, dont la
construction s'effectue inconsciemment à partir des émotions
et des sentiments éprouvés dans la relation physique que
l'enfant a avec son entourage. La représentation mentale se retrouve
dans les subtests Arithmétiques, Code et mémoire des chiffres
(en ordre inverse), mais il faut une observation qualitative en plus des
résultats pour savoir si cette sphère peut être moins
investie (à moins que les chutes soit probantes, et encore...)
Ces deux derniers subtests (Cubes et Assemblages d'objets) ont donc rapport
auxréférences spatiales. Je vous livre un écrit de
Simone Bourgès à ce propos :
"En dehors des difficultés d'origine instrumentale, un échec
à ces épreuves peut manifester une carence ou des traumatismes
vécus lors de la formation des références spatiales
dans la première relation objectale. Une angoisse massive d'abandon
ou de mort, liée au retour trop attendu du visage de la mère
déjà reconnu, peut fortement altérer la structuration
de la distance spatiale. Par la suite la structuration de l'espace à
trois dimensions et de la latéralisation, se greffant sur les acquisitions
antérieures reste déficitaire". L'auteur parle là
d'échec, ce qui n'est pas le cas de résultats au-dessus
10 de note standard mais avec un écart à la moyenne interne
de l'enfant, on peut à penser qu'un phénomène semblable
(bien qu'a minima par rapport à la force des termes employés
par Mme Bourgès) pourrait être à l'uvre. Cela
se retrouve souvent dans les cas où dans la famille (donc en remontant
dans
le temps, au niveau de l'histoire des parents, donc question que cela
soulève : votre propre mère était-elle "maternelle"
ou avait elle des parasitages du fait de sa propre histoire par rapport
au contact physique et visuel, bref, où pourrait il y avoir manque
?)
Sinon, peut être y a-t-il tout simplement quelque chose d'instrumental.Comparaison
des échelles verbale et performance
Le décalage entre verbal et performance au détriment
du performance peut également venir du fait que les épreuves
de cette échelle sont chronométrées et non celle
de l'échelle verbale (hormis Arithmétique surtout pour les
dernièresquestions où il y a une bonification si la personne
donne le résultat dans les 10 secondes). Donc on peut voir là
le rapport au challenge, et la confiance en soi peut énormément
jouer dans cette échelle car il est plus difficile de travailler
la réassurance (de la part du psy) dans cette échelle qu'à
l'échelle
verbale, où on peut creuser les réponses, être plus
dans le relationnel.
Le code est assez symptomatique de cela car c'est l'une
des épreuves qui est la plus sensible à l'émotivité
(comme Arithmétique est celle qui y est la plus sensible dans l'échelle
verbale, d'où d'ailleurs sur une étude statistique de l'APPSIS
sur des centaines de protocoles de WISC, l'observation de courbes en V
ou W avec chute à un ou les deux de ces subtests observées
très fréquemment).
Le code met en jeu également le désir de réussir
(un peu le sens du challenge) et est très souvent mis à
mal quand il y a échec scolaire. Il faut également faire
attention en observant les résultats avec Arithmétique et
Mémoire des chiffres (épreuve optionnelle) qui permettent
de voir s'il n'y a pas un problème avec les symboles chiffrés
(la représentation symbolique des chiffres, dit-on chez nous :)).
Comparer aussi avec Symboles (optionnel également) pour voir si
avec moins d'écriture et de coordination visio motrice, le résultat
n'est pas meilleur (cf le fait que l'attention et la concentration sont
également mis en jeu par Code et que l'on retrouve la même
consigne dans Symbole : en faire le max. en 2 minutes).
Cubes met en jeu très fortement la représentation
mentale, donc une observation de la passation elle-même est importante,
il est important d'observer la façon dont l'enfant s'est pris pour
réaliser cette épreuve (par tâtonnement ? essai-erreur-réussite
? ou décompose-t-il la figure dans sa tète, versus représentation
mentale, et met-il la bonne face du cube au bon endroit de façon
efficace ? ou a-t-il l'intuition de la bonne réponse, mais tendance
à changer de face au dernier moment (cf. manque de confiance en
soi, avec derrière des messages internes ressemblant à "tu
n'es pas capable") ? ou se cache-t-il une crainte de morcellement
derrière (la crainte d'être fou par exemple peut favoriser
ce phénomène, je précise que je ne parle pas de l'angoisse
de morcellement que l'on retrouve dans la schizophrénie, mais quelque
chose de très très a minima).
Assemblage d'objets est à mettre en relation avec
mon propos sur l'Image du corps (mais comme vous l'avez vu, Assemblage
d'objets n'est pas que cela).
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